Environ un an après Mémoires d’oubli, en 1992, j’ai en réalisé une sorte d’extension, Portrait d´Helen Merrill, qui trouvait sa place dans une manière de reportage sur elle pour le programme musical de France-Culture. Les séquences chantées (tirées de Mémoires d’oubli) entraient en contrepoint avec des extraits de conversation où elle me parlait de sa relation de complicité avec l’univers sonore, et pas seulement de la voix. On pouvait également entendre des traces des environnements dans lesquels cet entretien avait été réalisé, et auxquels Helen réagissait spontanément (l’extérieur du forum des Halles, un manège, des cris d’enfant, un bassin gelé et des bruits de glaces – on était en hiver -, l’église Saint-Eustache). Alors que, dans Mémoires d’oubli, je n’avais pas ressenti la nécessité d’intégrer des sons extérieurs ; à cause de la connotation intime et intériorisée du rapport à la voix et à la mémoire, il me semblait que, dans ce cas, je pourrais avancer une autre déclinaison de mes matériaux chantés, qui entrent en interférence avec des phénomènes concrets, quotidiens. C’était aussi un prétexte à « mettre en scène » la personne d’Helen Merrill, mais uniquement au moyen du son.