poèmes de Claude Melin
soprano, violon, alto, violoncelle, clarinette, piano (15′)
Intervalles, dir. Alain Dubois, Festival de Metz, novembre 1983
Les Allégories sont basées sur des schémas de jeu musical destinés à un groupe instrumental de formation libre auxquels j’avais auparavant donné le nom de cribles (reproduits dans le livre-partition Cribles et stratégies); il s’agissait généralement de réseaux de hauteurs et d’intervalles dont l’organisation dans l’espace tenait à la nature mobile du jeu et dont la logique musicale pourrait transparaitre visuellement, comme des « cribles » permettant de jouer sur les polarités harmoniques. Pour que les données musicales pénètrent l’espace plastique au lieu de demeurer en regard, j’ai en effet élaboré une série de telles « constructions » ;Claude Melin les a prises comme cibles de ses interventions graphiques et, dans un troisième temps, je les ai reprises à mon compte en me laissant guider par les pistes ainsi suggérées pour en déchiffrer de nouvelles hypothèses musicales. Par la suite, Cl. Melin a une nouvelle fois développé graphiquement ces schémas.
Dans Allégorie I, notre intention était essentiellement de concevoir un processus de jeu aux conséquences imprévisibles qui favoriserait des rebondissements d’une logique à une autre. Inscrites au coeur des notations, les calligraphies manifestent des énergies gestuelles, suggèrent des modes d’attaque, d’articulation, d’ornementation, des manières de passer d’une note-pivot à une autre et d’introduire des séquences mélodiques, de varier la densité des événements, orientant ainsi le parcours à travers le schéma originel selon le dynamisme qui leur est inhérent.
C’est donc essentiellement de la métamorphose de gestes graphiques en gestes musicaux dont il est question dans Allégories, ainsi que de la confrontation entre une architecture musicale « hors temps » et une écriture calligraphique qui l’oriente selon toutes sortes de trajectoires temporelles. La collaboration avec Claude Melin s’est faite en plusieurs étapes dont cette partition présente une sorte de synthèse. Des textes de Claude Melin, écrits simultanément à l’élaboration de ses planches graphiques, tendent à souligner les termes de cet accord entre le visuel et le musical.